Suite de la saga des congés de taxes
En août dernier, Sherbrooke Citoyen publiait un billet de blogue sur la situation hors de contrôle des crédits de taxes à la Ville de Sherbrooke. Quelques jours plus tard, la conseillère Évelyne Beaudin publiait une courte analyse sur Facebook au sujet des congés de taxes offerts ailleurs au Québec pour conclure qu’en 2019, la Ville de Sherbrooke offrait près du tiers de tous les congés de taxes offerts par les municipalités aux entreprises partout au Québec (!).
À la suite de cette publication, Sherbrooke Citoyen a appris que la Ville avait en sa possession, depuis 2018, une étude effectuée par Sherbrooke Innopole pour comparer nos programmes de congés de taxes à ceux de trois autres grandes villes du Québec, soit Longueuil, Trois-Rivières et Saguenay. Cette étude montrait clairement que Sherbrooke dépensait plus qu’ailleurs en congés de taxes.
À preuve, pour les constructions neuves, Longueuil et Trois-Rivières offrent des congés moins longs qu’à Sherbrooke (5 ans ou moins plutôt que 10 ans). Saguenay offre aussi 10 ans de crédits de taxes, mais leur crédit est « dégressif », c’est-à-dire qu’il diminue année après année.
Pour les agrandissements, Longueuil offre un crédit de 5 ans comme Sherbrooke, mais encore là, le crédit est dégressif et un certain montant d’investissement est nécessaire pour l’obtenir. Saguenay limite quant à elle les congés de taxes à une zone précise tandis que Trois-Rivières ne semble pas avoir de programme précis pour les agrandissements.
Au-delà des congés de taxes, il importe également de comparer les prix de vente des terrains industriels, car il serait possible pour une municipalité généreuse en crédits de taxes de se « rattraper » de ce côté. Ce n’est pourtant pas ce qui se produit à Sherbrooke. En effet, pour ce qui est du prix de vente des terrains industriels, Sherbrooke offre un prix fixe (1 $ le pied carré) en deçà de la fourchette de prix prévue à Saguenay et égale au prix plancher de Longueuil. Trois-Rivières se situe à mi-chemin en ouvrant la possibilité de vendre en bas de 1 $ le pied carré.
Un manque de réflexion et de rigueur
Ce qui ressort de cette courte analyse, c’est que les autres villes comparables à Sherbrooke semblent avoir une approche beaucoup plus mesurée dans leurs stratégies pour inciter les entreprises à s’installer sur leur territoire.
En 2018, la Ville avait de bons indices que Sherbrooke dépensait plus que ses pairs pour les congés de taxes et qu’elle offrait des prix de terrains parfois moindres qu’ailleurs.
Il y a lieu de se demander pourquoi le maire, l’administration et Sherbrooke Innopole n’ont rien fait pour redresser la situation à la vue de cette analyse.
Pourquoi ne pas avoir proposé au conseil municipal de limiter les crédits de taxes? Pourquoi ne pas avoir au minimum lancé un processus de révision de nos programmes incitatifs? Et surtout, pourquoi avoir caché cette étude comparative aux autres élu.e.s?
Sachant aujourd’hui que le programme de congés de taxes est devenu hors de contrôle à peine un an plus tard, ces questions restent forts pertinentes pour quiconque a à cœur la saine gestion des fonds publics.
Alors que le maire siégeait à Sherbrooke Innopole; alors que lui-même avait critiqué les congés de taxes en campagne électorale, il n’a pourtant rien fait… à part embaucher une firme de communication pour faire passer la pilule dans la population.